Jour 8 : Mandres-en-Barrois a déjà dit NON !

Ce matin est un rendez-vous Ni DUP Ni DAC très symbolique. On est à Mandres-en-Barrois, commune meusienne de 120 habitant.e.s, très stratégique pour le projet de mégapoubelle atomique. C’est le conseil municipal de ce village qui accepta l’acte d’échange entre le Bois Lejuc (alors son bois communal) et le Bois de la Caisse, enflammant la colère des opposant.e.s à l’Andra et amplifiant la mobilisation de l’occupation du bois sacrifié.

Arrivée à 9h10. En face, l’église affiche sur son grillage NI DÉSERT NI CIMETIÈRE POUR NOS TERRES. Le village est déjà préparé pour l’accueil des commissaires enquêteur.ices avec une banderole violette sur la façade de la mairie MANDRES A DÉJÀ DIT NON ! et une autre hissée au-dessus de l’entrée principale : DÉBAT PUBLIC ? DÉBAT BIDON ! Un message qui rappelle le débat public de 2013 sur Cigéo rebaptisé « débat-bidon» par les associations d’opposition et qui a été joyeusement boycotté et chahuté par un public militant très nombreux.

Une quarantaine de gendarmes sont déjà visibles dans les rues et sur la place de la mairie. Cela fait 2 gendarmes par militant. Ou 1 gendarme par paire de bras ou de jambes qui commencent à s’échauffer pour la session de gym matinale Acti’danse. Le théâtre de la pseudo-démocratie a débuté à 9h30 et les opposant.e.s inaugurent cette 5e permanence en chorégraphie, sous les regards des gendarmes amusés, n’ayant rien d’autre à faire pour tuer l’ennui que de nous regarder et nous filmer.

Le nouveau maire Julien Robert est ici pour cette demi-journée d’enquête publique. Son conseil avait rendu un avis défavorable à la déclaration d’utilité publique de Cigéo au début de l’année.

Tout comme ceux de Ribeaucourt, Bure et Horville-en-Ornois. En tout, 4 villages cibles du projet de mégapoubelle atomique et qui ne sont pas DUPes… Comme le conseil municipal de Bure qui a lancé un message fort dans sa délibération : « il est persuadé que le village de BURE mourra écrasé par le rouleau compresseur qu’est l’Andra. ». A Mandres, on déplore notamment qu’une partie du Bois Lejuc « poumon vert de la commune et des habitants » sera immédiatement défrichée. Et la mairie de Ribeaucourt, elle, s’inquiète entre autres pour la quiétude du village, qui sera chamboulée par le ballet incessants de camions…

Les mairies flambant neuves, les trottoirs en marbre et les éclairages publics design à économie d’énergie ne font plus illusion : nos villages s’éteignent au milieu de ces parures clinquantes et artificielles. Résultat de près de trente ans d’achat des consciences et des élu.e.s à la Made in nucléaire.

Mais autant en rire qu’en pleurer… Alors après l’Acti’danse, place au grand jeu-spectacle Nuclé’hair ! Seras-tu répondre correctement à la langue de bois nucléocrate ?

En fond : des dizaines de gendarmes comme figurants et un décor ultra réaliste avec une mairie où il a l’air de se jouer un vrai grand moment de démocratie et de citoyenneté.
Sur scène : 1 table, 5 chaises et 5 acteurs jouant aux promoteurs du nuclé’hair à la logorrhée politicarde bien syncopée. Leur but : convaincre les habitant.e.s du territoire des bienfaits de la coiffure irradiante (bienfaits qu’iels ne soupçonnent pas encore, bien évidemment…)

Dans la salle (en plein air) : un public qui hurle « Bingo » ou applaudit à toutes les formules démago-magiques lancées sur scène comme « risque négligeable », « incarner la participation » ou « renforcer la coopération ».

Coupes Little Bol, nuke longue ou dégagée : le nuclé’hair est un secteur d’avenir qui promet des opportunités de croissance capillaire exceptionnels pour développer le département et ses habitants. Hé oui, il n’y a pas que l’Andra qui sait organiser des débats bidons…

 

On termine cette matinée de mobilisation par une discussion sur l’actualité juridique du Bois Lejuc. Grande nouvelle : les habitant.e.s de Mandres-en-Barrois viennent de se pourvoir en cassation contre l’arrêt rendu le 10 mai 2021 par la Cour d’appel de Nancy. L’instance a refusé de constater la nullité absolue de l’acte d’échange du Bois Lejuc, signé par l’ancien maire de la commune et l’Andra, le 6 janvier 2016. L’opposition ne laisse pas tomber pour revendiquer le Bois Lejuc comme un bien communal inaliénable appartenant à l’ensemble des habitant.e.s du village depuis des temps immémoriaux.

12h30. Gendarmes et vigiles de l’Andra en position pour la sortie des commissaires enquêteur.ices. C’est à peine si on les voit monter dans leur véhicule. Une scène affligeante pour une enquête sous surveillance… et pas si publique que ça apparemment.