Ce vendredi matin était prévue la deuxième permanence de l’enquête publique. Que l’on veuille nous faire croire que le bien-fondé d’un projet aussi démesuré soit suspendu à l’avis des riverains d’un village de 82 habitant.es ne cessera de nous étonner. En réponse au surprenant manque de considération des autorités pour le vernis démocratique auquel on aurait pu s’attendre deux jours plus tôt, les opposant.es ont préparé de nouveaux tours pour contrecarrer la venue des enquêteur.ices. La Préfecture, pour sa part, comptait toujours faire semblant d’y croire en faisant son possible pour que les celleux-ci puissent parvenir à la mairie, à l’abri des regards des journalistes aux abonnés absents. Le décor est planté.
Dès 7h du matin débute un ballet de barrières, bottes de pailles et autres seaux à compost visant à décourager l’entrée dans la mairie. Impossible de bloquer les portes ce matin, quelques gendarmes ayant eu le privilège de passer la nuit au cœur de la municipalité. Il faut croire que lagendarmerie du labo et l’hôtel du Bindeuil ne suffisent plus…
Les heures suivantes auront consisté en un va-et-vient bleu marine sur le parking du CLIS, alternant les charges des casqués, grenades à la main, et leur retraite face aux bombes de peintures et autres jets de matières biodégradables multiples. Les musiques entraînantes de la boum improvisée et le vrombissement des aéronefs divers accompagneront ce début de matinée.
Sans doute irrités par les slogans peints sur les pavés neufs et par ses propres gaz renvoyés par un vent opportun, le « dispositif » finira par parquer les opposant.es dans la cour arrière de la maison de résistance peu après 10h. Quand les enquêteurs sont-ils parvenus à rentrer dans le bâtiment ? Mystère… Et on aura
it été bien en peine de trouver des badauds pour nous renseigner. Fin du premier acte.
L’après-midi était prévue la seule réunion publique d’information sur les quarante jours d’enquête. Nous allions enfin savoir comment les habitant.es des environs pourraient se faire un avis éclairé sur plusieurs milliers de pages de dossier technique en une dizaine de minutes de permanence en mairie.
La séance a eu lieu dans la très excentrée salle polyvalente de Gondrecourt à laquelle on accédait en serpentant entre des véhicules d’une Gendarmerie présente mais bien plus apaisée que le matin même. Une centaine de personnes se trouvaient dans la salle : le public, l’équipe d’animation, Patrice Torrès, le nouveau directeur du site de Bure-Saudron, une poignée de cadres de la filière électronucléaire ainsi que les commissaires enquêteurs, desquels nous avons enfin pu attester la présence. Au centre de la scène se trouvait le Meuble : un chariot à roulette aux tiroirs sur mesure pour chaque partie des 36kg du dossier d’enquête publique.
Comme pour le débat public de 2013 ou les réunions de concertation du PNGMDR de 2019, l’envie était de rappeler ce que l’Histoire des débats publics sur les grands projets nous a appris. Ceux-ci servent surtout à entretenir l’illusion démocratique en invitant la population à faire des lettres au Père Noël de de doléances diverses à des beaux-parleurs formés à la communication non-violente plus qu’à la prévention des risques industriels. Ainsi, aux premiers applaudissements zélés succédèrent des invectives sonore et de retentissants coups de sifflets opportunément dissimulés sous les masques Covid. « Si vous n’êtes pas DUP, exprimez-vous » pensa-t-on lire, en boucle, sur les lèvres de l’animateur de la réunion dont le microphone ne suffisait pas à couvrir les protestations.
Au bout d’une demi-heure, le Powerpoint s’éteignit une ultime fois et la tentative de conférence pris fin. Des petits groupes de discussion et autres chorales se formèrent spontanément. Le Meuble, tristement abandonné par la sortie des enquêteurs publics, remplacés par un cordon de gendarmes, put alors être « consulté » par les opposant.es.
La MECDU des ScoT, mélée à des photosde chauve-souris menacées et autres dessins techniques finirent en confettis pour célébrer ce beau moment festif que les employés de l’ANDRA, visiblement nerveu.ses, ne semblaient pas vouloir partager trop longtemps. Une pensée et un petit mot tout de même pour ceux et celles qui auraient bien aimé que le chargé de communication lève ce jour leurs doutes sur le projet Cigéo : « À l’impossible, nul n’est tenu ».
La sortie de la salle s’effectua dans le calme, sans véhémence de la part de l’Équipe Bleue. Malgré tout, compte tenu des circonstances, la projection du Dossier Plogoff en plein air à Gondrecourt ne put avoir lieu. La journée s’acheva donc tranquillement à Mandres par une projection de la Bataille de l’eau noire, un autre excellent récit de lutte du Cinéma Voyageur, accompagnée d’une gorgée de mirabelle hors d’âge.